Vincent Duchêne : “faire de la performance au plus haut-niveau ”
Vincent Duchêne, est entraineur en chef de l’équipe de France de para ski nordique. Pour les Jeux Paralympiques de Pékin son équipe est constituée de quatre skieurs : Benjamin Daviet (LW2, handicap membre inférieur, ski debout) et Anthony Chalençon (B1, non-voyant) accompagné de ses deux guides, Brice Ottonello et Alexandre Pouyé. Une équipe resserrée mais efficace, plus que jamais déterminée pour rentrer de Chine avec des médailles autour du cou.
Peux-tu nous raconter ton parcours en tant que skieur puis entraineur ?
Je suis passionné de ski, je vis à Autrans- Méaudre en Vercors, une région où du ski, on ne fait que ça. Je suis un ancien athlète de haut-niveau en ski de fond. J'ai fait cinq ans en Equipe de France, deux ans en junior, trois ans en sénior. Par la suite je n’ai pas forcément beaucoup entrainé mais j’ai beaucoup encadré, notamment dans les classes sportives du lycée de Villard-de-Lans et les jeunes de mon club car je suis aussi président du Ski amical Meaudrais depuis dix ans.
A titre personnel, comment en es-tu arrivé à travailler avec la Fédération Française Handisport ? Tu étais chez les valides auparavant ?
En 2011 j’ai eu un premier contact avec le monde parasportif car Thomas Clarion cherchait un guide pour l’accompagner aux Championnats du monde 2011, son guide de l’époque était instituteur et le rectorat ne voulait pas le libérer. On m’a contacté pour savoir si ça m’intéressait. J’avais envie de vivre cette expérience mais je n’ai pas pu le faire tout de suite car finalement son guide a pu se libérer. Je suis resté en contact avec l’entraineur de l’équipe de France, et en 2013 quand ils ont eu besoin de quelqu’un pour s'occuper de la logistique technique : fartage, choix des skis... j’y suis allé. J’ai fait ça jusqu’en 2018, et j’ai aussi été guide remplaçant sur des Coupes du monde pour Thomas Clarion et Anthony Chalençon. Pour les Jeux de Pyeongchang l’entraineur de l’époque avait envie d'arrêter, la fédération m’a alors proposé de prendre sa place. Le poste m’intéressait, j’avais beaucoup d’envie pour permettre aux gars de faire de la performance au plus haut-niveau. J’ai foncé.
Quel est ton rôle en tant qu’entraîneur en chef ?
Il y a beaucoup de casquettes et surtout, je ne suis pas seul, avec moi il y a trois autres membres du staff : un kiné, un entraineur de tir, Pascal Margueron, et un technicien, Paul Lucci. On gère beaucoup de choses en commun. Moi je gère tout ce qui est logistique pour les stages, les déplacements, les inscriptions aux courses. Je gère aussi tout ce qui est programmation d’entrainement pour les athlètes : musculation, aérobie, intensité, séances techniques. Je fais aussi le suivi HRV de nos athlètes, c’est la variabilité de la fréquence cardiaque, ça me permet de voir quand je peux leur caler des séances intenses ou pas.
Suite aux résultats des championnats du monde qui se sont déroulé à Lillehammer il y a quelques semaines (3 médailles : 1 argent, 2 bronze), vous arrivez dans quel état d’esprit pour les Jeux ?
On va aux Jeux dans un esprit de guerrier. Il a eu quelques déceptions, mais on finit avec l’argent sur le relais, et cette course pour Benjamin comme Anthony, c’est une course qui leur tient à cœur. C’est l’épreuve la plus importante de leur histoire : c’est là que l’un et l’autre ont été médaillés pour la première fois aux Jeux. C’est la course où la veille au soir on a la boule au ventre pour s’endormir, athlètes et staff compris. Aux championnats du monde ils font deux relais chacun, nous étions la seule équipe à faire comme ça, ils se transcendent et ils remportent l’argent dans une belle bataille. Ca donne envie d’être aux Jeux et de faire la même chose, mais en mieux.
GettyImage/Naomi Baker - Benjamin Daviet, médaille d'or relai open, Peyongchang 2018
Peux-tu nous parler des deux athlètes sélectionnés, Benjamin Daviet et Anthony Chalençon ?
Benjamin c’est un grand bosseur, il écoute beaucoup ce qui se fait à côté, il se renseigne auprès des athlètes valides, il fait le tri dans ce qui peut lui servir ou pas. C'est quelqu’un qui ne lâche rien, c’est un combattant avec une mentalité de fer. Je ne l’ai jamais trop vu stressé. J’ai rarement besoin de l’encourager au départ. Aux Jeux de Sotchi, il a fait une première médaille en relais par équipe, ça lui a donné envie d’en avoir une en individuelle. Il s’est consacré à ça et il a réussi, aux Jeux de Pyeongchang en 2018 il a fait trois médailles d’or et deux d’argent. Pour les Jeux de Pékin, il sera là à 200%.
Anthony vient du ski alpin. La première fois qu’il a fait les Jeux, c’était à Vancouver, ça a été une expérience difficile pour lui, il s’est rendu compte que le ski alpin n’était sans doute pas la meilleure discipline pour lui. En 2011, Christian Femy le directeur sportif de la fédé, l’a orienté sur le nordique. Il s’est accroché à ce sport, il a trouvé du plaisir à en faire et il a progressé. Il a fait les Jeux de Pyeongchang 2018 avec une médaille de bronze en individuel et une médaille d’or dans le relais par équipe, pour lui ça a été une expérience inoubliable. Maintenant, pour Pékin, le seul objectif c’est de rééditer ses performances et de concrétiser le travail accompli. Depuis 2019, Anthony a deux guides qui se relaient sur les semaines d’entrainement. Il y a Brice Ottonello, plutôt spécialiste de combiné nordique, il a fait deux, trois ans en Equipe de France de la discipline, et Alexandre Pouyé, qui lui était en équipe de France de ski de fond pendant plusieurs années. Avoir deux guides permet à Anthony de faire de séances à bonne intensité, notamment pendant les stages.
Les test events ont été annulés l’année dernière à cause de l’épidémie, comment on aborde des pistes qu’on ne connaît pas, pour les athlètes et même pour toi en tant que coach ? Est-ce que ça change l’approche de l’événement ? Est-ce que ça rebat un peu les cartes, ou justement c’est l’expérience qui va parler ?
C’est complexe. On a l’habitude d’aller sur les sites l’année d’avant les Jeux pour voir les conditions météo, les conditions de neige, ça permet aux techniciens de faire les premiers tests, d’avoir une base de données avant d’arriver. Là on n’a pas pu le faire, mais on a quand même eu quelques infos, quelques photos des sites qui m’ont permis de travailler sur le tracé des pistes. On a bossé là-dessus sur les séances d’intensité, on a essayé de trouver les mêmes pourcentages de pentes pour travailler certains points techniques. Et puis on a aussi la chance de pouvoir suivre les Jeux Olympiques à la télévision, on sera sur les mêmes pistes donc on regarde les vidéos des courses. Et aussi, on profite des gens qui sont aux JO, car on a de très bons contacts sur place avec les valides, ils nous transmettent des infos sur les conditions de neige, sur le fartage. Ça nous permet d'avoir beaucoup de données, même si on sait déjà que ce ne sera pas les mêmes températures pour nous, ce sera sans doute petit peu plus chaud. Et puis, en temps normal, pour qu’Anthony se mette la piste en tête, on a l’habitude de faire un tour des pistes avec une Gopro pour enregistrer les différentes annonces des guides. Ensuite, il se met le film sur son ordinateur et il apprend la piste par cœur. Ça, on n’a pas pu le travailler en amont, mais des gars qui sont aux JO vont nous faire un retour Gopro des pistes. Ça se fait un peu au dernier moment, mais on a déjà bien bossé dessus.
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